Depuis 2005, tous les six ans, une équipe de chercheurs pilotée par l’économiste Viviane Tchernonog du Centre de l’économie de la Sor- bonne (Paris 1) présente les résultats de son enquête sur le paysage associatif français. Elle vient de rendre publics ses derniers chiffres. L’occasion de constater la vitalité des associations… mais aussi de mettre le doigt sur leurs difficultés.
200 000 associations en plus en 6 ans !
Le secteur associatif semble plus vivant que jamais. Il y a vingt ans on dénombrait 800 000 associations en France. En 2004, la barre du million était dépassée. En 2011, on en comptait 1 300 000. Et la hausse continue puisque nous en sommes désormais à 1 million et demi ! Viviane Tchernonog commente : « Cette augmentation d’environ 200 000 associations sur une période de six ans est seulement due à l’augmentation du nombre de petites associations de bénévoles : les associations employeuses ont désormais tendance à baisser légèrement, signe d’un mouvement de concentration qui s’opère. » Ainsi se dévoile le visage paradoxal d’un monde associatif dont les modèles sont extrêmement variés. D’un côté un dynamisme citoyen, local et démocratique reflété par 70 000 nouvelles associations chaque année (une fois déduites les associations dissoutes ou sans activité) ; de l’autre des structures qui, pour consolider leur modèle économique, ont tendance à grossir, résultat souvent de regroupements ou de fusions. Car si le nombre d’associations employeuses a effectivement baissé de 0,3 % par an au cours des six dernières années, le nombre de salariés associatifs a augmenté (+ 0,4 % par an en nombre et + 1 % par an en équivalent temps plein) ainsi que la masse salariale du secteur (+ 1,8 % par an au cours de la même période).
Polarisation du monde associatif
La tendance révélée par l’étude de Viviane Tchernonog confirme ce qu’elle avait déjà mis en évidence lors de l’édition 2012 du Paysage associatif français : une consolidation des grosses associations qui fournissent l’essentiel de l’emploi salarié du secteur et une multiplication des très petites associations constituées uniquement de bénévoles. Entre les deux, les associations moyennes continuent à diminuer mais leur poids augmente car celles qui restent sont parmi les plus grosses. L’explication : les difficultés de plus en plus grandes à boucler des budgets qui voient baisser la part des financements publics. Du coup, soit on s’en passe (et c’est le cas de la galaxie des petites associations), soit on rejoint de grosses associations plus solides qui bénéficient de financements stables, ou au moins réguliers, comme celles qui œuvrent dans le médico-social.
Budgets : de moins en moins de subventions
« Ce qui apparaît clairement dans les principaux résultats de l’en- quête, c’est l’accentuation des phénomènes relevés en 2012 : baisse des financements publics, hausse des financements privés », explique l’économiste. Tandis que les budgets des associations ont crû de 1,6 % par an sur la période (+ 10 % environ en six ans), les subventions publiques ont baissé de 1,7 % (soit – 10 % en six ans). Même si on y ajoute les financements publics qui passent par les appels d’offres (les marchés publics avaient explosé de 2005 à 2011 (+ 73 %) et ont continué à augmenter depuis), le total des financements publics a baissé de 1,2 % sur les six dernières années (- 0,2 % par an). L’évolution des relations financières avec les pouvoirs publics ou collectivités est donc de plus en plus marqué par l’appel à la concurrence dans une relation de prestataire toujours plus proche du modèle des relations avec les entreprises. Alors comment les budgets associatifs arrivent-ils à se maintenir ?
« Le fait majeur, répond Viviane Tchernonog, c’est que cela pro- vient principalement de la hausse de la participation des usagers : + 4,2 % par an, soit + 25 % en six ans. »
En savoir plus :
La synthèse de l’étude : https://bit.ly/2RbWGAS