Traditionnellement les dirigeants d’une association exercent leurs fonctions à titre gracieux. Toutefois, il existe des possibilités de mettre en place une rémunération des dirigeants d’une association, entre autres lorsque le budget de l’association le permet. Pour être légale et ne pas entacher le caractère désintéressé de l’association, cette prérogative doit être prévue par les statuts de ladite association et appliquée dans le strict respect de la réglementation en vigueur.
Deux possibilités légales
A. Rémunération des dirigeants : les trois quarts du Smic, une tolérance fiscale
Si certaines catégories d’associations (reconnues d’utilité publique) excluent la possibilité de rétribuer les dirigeants, la réglementation fiscale admet toutefois l’opportunité, pour les bénévoles ayant des fonctions d’administration ou pour ceux assurant un travail indépendant, la mise en place d’une compensation financière. Deux cadres légaux permettent de rémunérer des dirigeants, sans remettre en cause la notion de « gestion désintéressée » de l’association. Le premier est accessible à toutes les associations d’utilité sociale depuis 1998 et repris dans le cadre d’une instruction fiscale de 2006. Celle-ci prévoit une rémunération des dirigeants dans la limite des trois quarts du montant du Smic (soit, pour 2018, 1 123 € bruts mensuels). À noter que les montants versés au titre de cette rémunération sont soumis aux charges sociales (TNS) et sont comptés dans l’assiette de calcul de l’impôt sur le revenu du bénéficiaire. Il est par ailleurs possible dans le cadre d’un cumul de fonction qu’un administrateur de l’association soit aussi salarié de la même association. Dans ce cas de figure, l’activité salariée doit être distincte de la fonction bénévole mais aussi répondre aux critères du salariat parmi lesquels l’existence d’un lien de subordination.
B. Grandes associations, la limite de trois fois le PSS (plafond de la Sécurité sociale)
Pour les grandes associations, les dirigeants sociaux doivent pourvoir s’y consacrer à plein temps et bénéficier de rémunérations qui peuvent aller jusqu’à près de 10 000 € par mois, comparables à celles de cadres supérieurs. On ne peut plus être président d’une grande ONG qui emploie des milliers de personnes dans des pays en guerre et faire cela le soir en plus de son cabinet médical ou de son activité de chirurgien… Pour pouvoir rémunérer ses dirigeants tout en conservant son caractère désintéressé, une grande association doit respecter quatre conditions principales : la transparence financière ; le fonctionnement démocratique ; l’adéquation de la rémunération aux sujétions des dirigeants ; et le respect du plafond de la rémunération. La transparence financière implique que la décision de rémunérer un dirigeant soit prise lors de l’assemblée générale à la majorité des deux tiers des membres présents ou représentés qui fixe, hors de la présence du dirigeant concerné, le niveau de rémunération. Ces rémunérations doivent apparaître dans une annexe aux comptes de l’association et être présentées à l’assemblée générale. Dès lors, la certification des comptes par un commissaire aux comptes devient obligatoire.
Ensuite, le critère d’un fonctionnement démocratique correspond essentiellement à l’élection démocratique des dirigeants et à un contrôle de la gestion de l’association par ses membres. L’adéquation entre rémunération et sujétions des dirigeants est acquise si la rémunération correspond à des responsabilités et une activité effectives. Enfin, concernant le plafond des rémunérations, l’article 261- 7,1°, d, du Code général des impôts prévoit la possibilité, pour les associations dont les recettes (hors subvention) sont supérieures à 200 000 €, de dépasser le plafond des trois quarts du Smic sur la base d’un régime dérogatoire. Le montant des ressources à prendre en compte est le montant moyen constaté au cours des trois exercices précédant celui au cours duquel la rémunération est versée. Aucun dirigeant ne peut être rémunéré si les ressources de l’association sont en dessous de 200 000 €, un seul entre 200 000 et 500 000 €, deux entre 500 000 et 1 000 000 €, et trois au-delà. Dès lors, la rémunération mensuelle du président est plafonnée à trois fois le montant du plafond de la Sécurité sociale (actuellement 3 311 € mensuels) soit 9 933 € mensuels en 2018. Cette rémunération n’est pas cumulable avec la tolérance des trois quarts du Smic.
Cas des associations de jeunesse et d’éducation populaire
La loi du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté confirme la possibilité de rémunération des dirigeants au-dessus de la limite des trois quarts du Smic et facilite son application pour les associations de jeunesse et d’éducation populaire (JEP). En application de cette loi, ces associations peuvent rémunérer leurs dirigeants quelle que soit l’origine des ressources de l’association. Cet assouplissement s’accompagne de trois conditions restrictives :
– l’instance dirigeante doit être composée de membres dont la moyenne d’âge est inférieure à trente ans,
– ne peuvent être rémunérés que les dirigeants âgés de moins de 30 ans à la date de leur élection, pour une durée maximum de trois ans renouvelable une fois, le plafond de rémunération est abaissé, il est limité à une fois le plafond de la Sécurité sociale soit 3 311 € par mois en 2018.
Pourquoi rémunérer un dirigeant ?
La possibilité de rémunérer les fonctions d’administrateur contribuerait à rendre la fonction plus attirante. En effet, lorsqu’un élu associatif consacre beaucoup de temps et d’énergie à une association, assume des responsabilités lourdes de gestion de personnel ou budgétaire, intervient dans la conduite des activités de l’association, il peut légitimement se demander si cette charge ne mériterait pas une rétribution. Pour les associations qui en ont les moyens, proposer une rémunération peut être une option pour susciter l’intérêt d’un poste à responsabilités. De plus, proposer une rémunération pourrait faciliter l’accès des jeunes aux fonctions dirigeantes (ref. Loi du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté pour les associations de jeunesse et d’éducation populaire).
Quelles limites ?
Rémunérer les élus associatifs pourrait présenter le risque de faire apparaître l’association comme une entreprise comme une autre. Cela pourrait avoir pour effet la démobilisation des adhérents qui s’investissent bénévolement et altérer la confiance des personnes qui apportent des dons à l’association. Les donateurs sont généralement attachés à ce que leur contribution soit essentiellement utilisée pour les actions de l’association et peuvent douter de l’intérêt et la nécessité de rémunérer des administrateurs. Des financeurs publics de l’association peuvent aussi se montrer réservés face à cette situation, d’où l’intérêt de jauger le niveau d’acceptabilité d’une telle décision tant en interne qu’en externe.
En savoir plus :
– Article 261-7-1°d du Code général des impôts (CGI)
– Article L.241-3 du Code de la sécurité sociale (CSS)
– Bulletin officiel des finances publiques-impôts BOI n° 208 du 18 décembre 2006 BOI 4H-5-06
– Article 12 de la loi n°2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté