Permettre à l’activité de l’entreprise de se poursuivre dans le cadre familial, quand le chef d’entreprise ne sera plus là, c’est tout l’objet d’une reprise familiale. Mais préparer une telle opération est délicat car elle revêt une forte dimension psychologique.
« Les enfants peuvent ne pas avoir les mêmes objectifs, certains souhaitant reprendre pour pérenniser l’activité, d’autres plutôt en percevoir les fruits. Cela amène aussi le chef d’entreprise à se poser des questions personnelles », explique Karine Moss, responsable juridique chez CAEC, membre du groupement France Défi. A qui transmettre quand il a plusieurs héritiers ? Le faire via une vente ou dans le cadre d’une donation ? Comment satisfaire tout le monde tout en respectant ses propres objectifs ?
Reprise familiale: anticiper et se faire accompagner
Pour éviter les conflits, le maître mot est l’anticipation. Première étape : faire le point sur son projet avec des professionnels. « Le chef d’entreprise peut y réfléchir avec son expert-comptable et nous faisons généralement intervenir aussi le notaire voire, le cas échéant un conseiller en gestion de patrimoine », conseille la spécialiste. Deuxième impératif : communiquer avec l’ensemble des concernés.
Le chef d’entreprise doit discuter en amont de ses objectifs avec chacun des enfants. Il faut parler du projet de reprise, si plusieurs enfants sont impliqués, déterminer par exemple quelles fonctions ils vont occuper
Le fait d’anticiper permet ensuite de mobiliser plusieurs outils pour faciliter la transmission. Un pacte Dutreil peut ainsi être mis en place pour en limiter le poids fiscal. Il est aussi possible d’organiser à l’avance la transmission afin de limiter les tensions entre les héritiers au moment du décès.
Donation simple ou donation-partage
La mise en place d’une donation-partage, du vivant du chef d’entreprise, permet ainsi de répartir à l’avance son patrimoine. « Cela permet de donner exactement la même valeur de biens à chacun des enfants, sans forcément leur donner les mêmes biens. Ainsi s’il y a un enfant voué à reprendre l’entreprise, on peut lui donner les titres et compenser par la donation de biens immobiliers à ses frères et sœurs », illustre la juriste.
Lorsque le chef d’entreprise ne dispose pas d’autres biens que son entreprise, il est possible de mettre en place une donation-partage avec soulte. Celui qui reçoit l’entreprise s’engage alors à payer la soulte (somme d’argent), d’un montant équivalent, aux autres enfants. Accomplie avec le notaire, la donation-partage fait aussi intervenir l’expert-comptable qui détermine une valeur cohérente pour les titres transmis. De quoi limiter les sources de désaccord.
Reprise familiale: prévoir des dispositions dans le pacte d’associés
Il est aussi possible d’effectuer des donations simples de son vivant. Mais à la différence de la donation-partage, celles-ci sont rapportées à la succession : il sera tenu compte de la valeur des biens au moment du décès et non de la donation. Autre option : les titres du chef d’entreprise peuvent être vendus à l’enfant souhaitant reprendre, qui n’a alors pas de compte à rendre à ses frères et sœurs, dans la mesure où les titres ont fait l’objet d’une valorisation cohérente. Des dispositions peuvent aussi être prévues dans un pacte d’associés afin que certains héritiers se voient attribués les titres de manière préférentielle.
« On peut panacher les solutions. Il n’y a pas de vérité dans ce type de dossier », rappelle Karine Moss. L’important est de se faire conseiller pour déterminer les outils les plus adaptés et pouvoir clarifier les choses afin d’éviter les conflits.