Lorsqu’il est élevé, le taux de turnover peut constituer un signal d’alerte pour l’entreprise. Mais son interprétation doit tenir compte de nombreux paramètres.
Indicateur incontournable des tableaux de bord RH, le taux de turnover permet de mesurer la proportion de renouvellement des collaborateurs de l’entreprise sur une période donnée, généralement une année. « Pour le calculer, on ajoute le nombre de départs et le nombre d’arrivées de salariés pendant l’année et on divise la somme par deux. On divise ensuite cette moyenne par l’effectif total de l’entreprise au 1er janvier et on multiplie le résultat par 100 pour obtenir un pourcentage », détaille Brynhild Bataille, responsable RH du cabinet Premier Monde, membre du groupement France Défi.
Taux de turnover, un indicateur du climat social
S’il est si couramment calculé, c’est parce que ce taux de turnover peut mettre en lumière des problématiques au niveau de l’ambiance dans l’entreprise, du management ou des conditions de travail.
On le considère comme un indicateur du climat social : plus le taux de turnover est haut, moins le climat social est potentiellement bon
Un taux élevé sera ainsi généralement perçu comme un signal d’alerte. De forts mouvements de personnel et notamment de nombreux départs peuvent impliquer une perte de savoir-faire et de la cohésion au sein des équipes. Ils sont en outre coûteux. « Cela signifie que l’entreprise doit investir beaucoup sur le recrutement et beaucoup de renouvellement peut être le signe que les collaborateurs ne se sentent pas forcément bien dans l’entreprise», précise Brynhild Bataille.
Toutefois, il est difficile d’établir le seuil à partir duquel le taux de turnover constitue un signal d’alerte. On considère souvent qu’il est faible en-dessous de 5 % et constitue un signal négatif au-delà de 15 %. « Mais il ne faut pas le regarder seul », prévient la spécialiste.
Différents facteurs à prendre en compte
Ainsi, plusieurs paramètres sont à prendre compte pour analyser cet indicateur. Dans certains cas, un taux élevé peut être la traduction logique d’une stratégie de l’entreprise et ne doit pas forcément susciter d’inquiétude. « Si on est dans une société en fort développement qui recrute beaucoup dans le cadre de sa croissance, on aura un taux de turnover élevé », illustre la responsable RH. De même, si l’entreprise se restructure et abandonne une activité, elle peut être amenée à se séparer des collaborateurs impliqués dans cette branche, ce qui fera mécaniquement augmenter son taux de turnover.
La pyramide des âges au sein de l’effectif peut aussi être en cause : si une part importante de collaborateurs atteint l’âge de départ à la retraite en même temps, une vague de départs sera constatée au sein de l’effectif.
Plus largement, l’interprétation du taux de turnover doit tenir compte du secteur de l’entreprise et du type de poste considéré. Dans les secteurs qui recourent massivement à une main-d’œuvre saisonnière ou embauchent beaucoup d’étudiants, le turnover est naturellement plus élevé que la moyenne. De manière générale, il y a un taux de renouvellement plus important sur les postes les moins bien payés et les moins qualifiés.
Comparaison et indicateurs complémentaires
« Si on prend le taux de turnover sans chercher à analyser derrière le taux de départ et le taux d’entrée ou encore le taux de démission par exemple et à calculer d’autres indicateurs comme le taux d’absentéisme, on risque de faire des interprétations biaisées », souligne Brynhild Bataille. Un premier bon réflexe est de chercher à comparer le taux de turnover dans son entreprise à la moyenne dans son secteur. Il peut être utile aussi de le mettre en perspective en reprenant les résultats obtenus les années précédentes.
Ensuite, il faut chercher à décomposer le taux de turnover pour comprendre comment s’explique son niveau. Est-il lié à de nombreux recrutements ou à des départs massifs de salariés ? Le cas échéant s’agit-il de démissions ? « Il faut creuser pour déterminer s’il y a un problème et d’où il vient. On peut notamment s’interroger sur la population touchée : est-ce que le fort renouvellement concerne les agents de maîtrise ou les cadres par exemple », conseille la responsable RH. L’objectif est de remonter aux causes du phénomène pour identifier les leviers sur lesquels jouer pour améliorer la situation. « Si l’entreprise a beaucoup de départs, ce peut-être parce que sa grille salariale n’est pas bien positionnée par rapport au marché, que certains profils sont chassés par des recruteurs ou parce que le climat social est mauvais », illustre-t-elle.
Enfin, s’il importe de s’assurer de répondre au mieux aux besoins des salariés pour assurer une certaine stabilité de l’effectif, gage d’efficacité, d’accumulation d’expérience et du développement d’une culture d’entreprise, avoir un minimum de turnover est aussi un signe de dynamisme. « Tout est une question d’équilibre, mais il peut être utile à l’entreprise de faire entrer un peu de « sang neuf » dans son effectif », assure Brynhild Bataille.