Entre les élections passées et à venir, les questions sanitaires et la crise en Ukraine, difficile de maintenir la politique en dehors de l’entreprise. Mieux vaut prendre quelques précautions pour éviter que certains débats politiques en entreprise deviennent de plus en plus houleux…
Vos collaborateurs ont envie de parler un peu politique ? C’est de saison. Mais attention, sujet sensible ! À la machine à café comme en open space, nul manageur n’est censé ignorer la loi. « Le problème est que les textes de loi sont complexes, voire parfois un peu contradictoires », observe Florence Marty, co-autrice du guide « Entreprises : 7 leviers pour renforcer votre pouvoir d’attraction » (éd. Eyrolles).
Pendant toute sa carrière, cette ancienne directrice des ressources humaines a vu la loi évoluer. « Pour éviter certaines dérives, le législateur a mis en place un principe de neutralité qui date de 2016. » En vertu de l’article L1321-2-1 du Code du travail, un employeur peut en effet restreindre « la manifestation des convictions des salariés » notamment si elles nuisent au « bon fonctionnement de l’entreprise ». « Mais cela suppose que l’entreprise ait pensé à inscrire cette disposition dans le règlement intérieur, poursuit notre experte. Et qu’elle l’ait fait ou pas, la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen rappelle aussi que tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression. Délicat…
Débats politiques en entreprise, ne pas lancer le débat…
Dès lors, comment garantir la sérénité en entreprise dès que la politique s’invite au bureau ? « C’est un sujet, dans mon expérience, dont les ressources humaines s’emparent assez peu et à tort », poursuit Florence Marty. Dans un premier temps, cette spécialiste invite les RH à, régulièrement, faire un point sur ces sujets, dans toute leur nuance, avec leurs manageurs. « Ceux-ci doivent comprendre que la liberté d’expression existe, mais qu’en même temps, aucun collaborateur ne doit se retrouver stigmatisé en raison de ses opinions. »
En entreprise, cette ligne de crête est parfois ténue.
Mon premier conseil serait de sensibiliser les manageurs à ne pas inciter certaines discussions et à les interrompre s’il sent qu’un sujet peut être trop clivant.
Parmi les fausses bonnes idées, éviter les soirées électorales entre collègues ou de les inviter à voter au bureau, même à bulletin secret, par exemple. Imaginez, dans une start-up réputée à gauche qu’un collaborateur exprime des opinions dites d’extrême droite ? Ou que des noms d’oiseaux comme « fasciste » ou « islamo-gauchiste » commencent à voler ?
Le droit au débat… syndical
« Mais on ne peut empêcher les gens de parler, à la cantine par exemple, et le manageur devra parfois calmer les esprits », ajoute notre experte. Dans ce cas, elle suggère de tempérer la situation pour éviter que toute forme de discrimination ne perdure. « Si un salarié veut éviter de travailler avec un autre en raison d’opinions politiques formulées, il faut rectifier le tir. De même, si l’on vous rapporte qu’un collègue est mis de côté… »
Reste toutefois un espace politique sanctuarisé par la loi. « Les seules opinions vraiment à part sont les opinions syndicales qui ont droit de citer dans l’entreprise partout et tout le long de l’année », précise Florence Marty. C’est le propre de l’expression syndicale, justement. « La seule limite demeure l’agressivité et en aucun cas le contenu de ce qu’on exprime. »