Bien que la crise sanitaire diminue en intensité, l’année 2020 aura laissé des traces. Employeurs et manageurs doivent être en première ligne pour guetter le mal–être de leurs collaborateurs de retour au bureau et discerner les risques psychosociaux post-Covid.
Les risques psychosociaux étaient déjà un sujet avant le Covid. Mais apparemment, la crise sanitaire n’a rien arrangé, bien au contraire. « Avec la perspective de revenir au bureau, je vois arriver des formes de détresse inédites, témoigne le médecin du travail Marielle Dumortier. Le recours au télétravail a causé beaucoup de souffrance. »
La professionnelle de santé revient en détail sur les conséquences du Covid pour les travailleurs : « La frontière entre vies privée et professionnelle a sauté. Il a fallu apprendre de nouveaux outils, de nouveaux modes de travail, apprivoiser les visioconférences. Avec l’école à la maison pour beaucoup, le premier confinement a été très éprouvant, sans parler de l’angoisse générale liée à la crise sanitaire ou à d’éventuelles difficultés économiques de son entreprise. » Le retour au monde d’avant n’est sans doute pas pour tout de suite.
Surveiller les symptômes
Dans ce contexte, notre spécialiste, autrice du livre Le monde du travail est devenu fou ! (éd. Le Cherche-Midi), invite tout d’abord les employeurs et manageurs à rester très attentifs aux risques psychosociaux. « Parmi les premiers signes à surveiller figurent une grande fatigue manifeste et un absentéisme inhabituel. Un manager doit aussi être sensible à des manifestations de résignation ou des différends et disputes pour des motifs qui peuvent paraître accessoires.»
Tout changement de comportement est le signe que quelque chose a changé ou ne va pas.
« En gros, tout changement de comportement est le signe que quelque chose a changé ou ne va pas. Cela vaut aussi pour une qualité de travail qui baisse », résume Marielle Dumortier. Les manageurs sont donc en première ligne pour observer ces indices. « Il y a aussi des liens affectifs qui permettent de déceler certains changements inhabituels. Quand un collaborateur reprend la cigarette ou boit un peu plus qu’avant, ce n’est jamais bon signe. »
Gérer les risques psychosociaux
Mais ces symptômes révélateurs ne sont pas le signe d’un burn-out inéluctable. « Il existe heureusement quelques parades », poursuit Marielle Dumortier. Une certaine bienveillance, au premier chef, n’est pas un vain mot.
« Il faut pouvoir créer un espace où le collègue qui ne va pas bien puisse parler. Cela peut être autour d’un café ou pendant un entretien. L’idéal est de ne pas aborder la question de façon trop frontale. Le manageur, qui ne va pas super bien non plus, peut aussi parler d’une vulnérabilité propre et ouvrir ainsi la discussion. »
Parfois, il suffira d’un aménagement d’horaires provisoire pour aider le salarié à aller mieux. « Car actuellement, on distingue clairement deux catégories de salariés : ceux qui ne veulent plus entendre parler du télétravail et ceux qui en ont encore besoin. »
Appeler la médecine du travail
Mais si les symptômes persistent, il faudra clairement demander l’accompagnement adéquat. « Légalement, l’entreprise doit prendre soin de ses collaborateurs. Un employeur ou un manageur peut donc directement contacter le service de santé au travail et solliciter une visite pour un tiers auprès de la médecine du travail. Normalement, les visites sont prévues tous les cinq ans mais on peut avancer un rendez-vous. »
Précision utile : cette visite peut aussi être sollicitée par le salarié lui-même s’il sent qu’il ne va pas bien.