Sous certaines conditions, il est possible de se séparer d’un salarié en congé maladie. Mais en cas de contentieux, les juges peuvent retoquer un licenciement si l’employeur n’a pas scrupuleusement respecté les règles en la matière.
Pour les salariés atteints d’une affection les contraignant à prendre de longs ou fréquents arrêts maladie, un licenciement s’apparente à une double peine. Pourtant, les employeurs ont le droit de mettre fin à la collaboration avec un salarié malade, sauf si ses arrêts sont liés à un accident du travail ou une maladie professionnelle. « Mais attention, il est interdit de licencier un salarié parce qu’il est malade, c’est considéré comme de la discrimination et, de ce fait, le licenciement sera déclaré nul par le Conseil de Prud’hommes. Il peut seulement l’être en raison des conséquences de son absence sur l’activité de la société », souligne Houria Kaddour, avocate lyonnaise spécialisée en Droit du travail. Encore faut-il remplir deux conditions cumulatives : une perturbation du fonctionnement de l’entreprise et la nécessité d’un remplacement définitif.
Une désorganisation objective liée au congé maladie
Pour que le licenciement d’un salarié en arrêt de longue durée ou enchaînant des absences plus courtes soit valable, son employeur doit apporter des preuves de la désorganisation qu’entraîne cette situation. « Et celles-ci doivent être objectives, par exemple la baisse du chiffre d’affaires, le mécontentement de la clientèle ou encore la surcharge de travail pour les autres employés », précise Houria Kaddour. Une désorganisation que les juges apprécient au regard de certains critères. La taille de l’entreprise ou du service concerné a son importance. Difficile par exemple de prétexter la désorganisation due à l’absence d’un salarié dans une entreprise dont l’effectif est de plusieurs centaines de personnes. La nature de l’emploi occupé est également prise en compte : il est plus facile de considérer que l’absence d’un cadre de haut niveau ou d’un collaborateur aux compétences rares a des répercussions négatives sur le fonctionnement de l’entreprise que celle d’un salarié peu ou pas qualifié. D’autant que ce dernier peut facilement être remplacé de manière provisoire, en faisant appel à l’intérim ou à un contrat à durée déterminée (CDD). Autre élément pris en considération, la durée du ou des arrêts maladie.
La nécessité d’un remplacement définitif
« La nécessité de remplacer de manière définitive le salarié malade doit également être solidement étayée, car c’est une condition strictement définie par la jurisprudence. Pas question, par exemple, de profiter de ce licenciement pour confier les missions de son ex-salarié à un prestataire extérieur. La fonction et la durée du temps de travail doivent être identiques. Et il doit s’agir d’un contrat à durée indéterminée (CDI) », explique Houria Kaddour. A noter, le remplacement « en cascade », est autorisé. « C’est le fait de remplacer le collaborateur absent par un autre salarié de l’entreprise, ce dernier étant lui remplacé par le biais d’une embauche externe en CDI », détaille Houria Kaddour. Si le délai dans lequel ce recrutement s’effectue doit être « raisonnable », il varie en fonction des situations. « Pour un poste très qualifié, il est admis que ce processus prenne du temps, surtout si l’employeur établit qu’il a publié des offres ou rencontré des candidats », constate Houria Kaddour. Cependant, la durée de prescription étant de deux ans, un salarié apprenant plusieurs mois après son licenciement que rien n’a été mis en œuvre pour le remplacer peut donc toujours saisir les Prud’hommes. Et s’il obtient gain de cause, entre le paiement du préavis et des dommages et intérêts pour le préjudice subi, la facture peut s’avérer salée. Surtout si l’intéressé n’a pas retrouvé d’emploi, ce qui est considéré comme un facteur aggravant.