La généralisation de la complémentaire santé n’a pas fini de préoccuper les entreprises. Alors que les derniers décrets d’application relatifs à cette nouvelle contrainte ne sont sortis que fin 2015, les entreprises qui ne respectaient pas les règles au 1er janvier 2016 s’exposent à de pointilleux contrôles Urssaf. Même celles qui se sont équipées dans les temps ne sont pas à l’abri d’un redressement.
Non seulement tenues de mettre en place une couverture des frais de santé pour l’ensemble de leurs salariés, respectant un panier minimal de garanties prévu par la loi et éventuellement élargi par les branches, et de le financer à hauteur de 50 %, les entreprises doivent en effet respecter un formalisme strict dans la mise en place et la gestion de ce régime.
Garder une trace des demandes de dispense de complémentaire santé
« Il existe notamment des cas de dispense pour certains salariés, par exemple ceux qui sont en CDD, mais il faut que le chef d’entreprise conserve la trace de la demande de dispense et du justificatif de chaque salarié. Si cela n’est pas fait correctement, ce peut être très préjudiciable pour l’entreprise », prévient Karine Delannoy, secrétaire générale de CTN France, membre du groupement France Défi.
En effet, la contribution de l’employeur au financement de ce régime est normalement exonérée de cotisations sociales, même si elle demeure soumise à la CSG CRDS, et à un forfait social de 8 % pour les entreprises de plus de 11 salariés. En cas de contrôle Urssaf, cette exonération peut être remise en cause.
Un formalisme à respecter
« Le contrôleur va d’abord regarder si l’entreprise a bien mis en place une mutuelle, puis, dans le cas où il existe un accord de branche sur le sujet, si le régime respecte bien ses règles. Il va vérifier le respect du formalisme dans la mise en place du régime, que tous les salariés sont couverts et si ce n’est pas le cas, que cela s’est bien fait à la demande du salarié et que l’entreprise dispose des justificatifs de chacun d’entre eux », détaille Julie Dekeirel, responsable du service droit social chez CTN France.
Pour l’entreprise, le risque d’un redressement est donc réel. « Auparavant, la simple absence de justificatif pour un cas de dispense pouvait entraîner la requalification de l’ensemble des contributions employeurs en rémunération », souligne Karine Delannoy. La loi de financement de la Sécurité sociale 2016 a cependant introduit un droit à l’erreur pour l’employeur en modulant le montant du redressement selon son motif.
Un redressement modulable
Celui-ci s’élève à une fois et demie les sommes manquantes lorsqu’il repose sur l’absence de production d’une demande de dispense ou d’un document nécessaire à l’appréciation du caractère obligatoire et collectif du régime. Il atteint trois fois ces sommes dans les autres cas, à condition que ce redressement ne révèle pas « une méconnaissance d’une particulière gravité des règles relatives au caractère collectif et obligatoire des garanties de protection sociale complémentaire » ou une volonté manifeste de discrimination.
Les employeurs ont donc tout intérêt à se montrer particulièrement vigilants concernant ce régime. « Pour ceux qui n’étaient pas dans les règles au 1er janvier ou ne le sont pas encore aujourd’hui, il est possible que les contrôleurs Urssaf se montrent plus tolérants s’ils peuvent faire état de leur bonne foi en prouvant qu’ils sont déjà entrés en contact avec leur assureur pour y remédier », note Julie Dekeirel qui conseille aux entreprises de se tourner, en cas de doute, vers leur cabinet d’expertise-comptable. « Nous pouvons réaliser des audits pour faire un état des lieux de la situation et signaler au besoin, ce qui ne va pas », explique-t-elle.