Instauré dans le cadre de la réforme des retraites, le compte personnel de prévention de la pénibilité a pour objectif de permettre aux salariés les plus exposés d’accumuler des points afin de partir plus tôt à la retraite, de passer à temps partiel sans perte de salaire ou de bénéficier d’une formation pour se reconvertir. Pour beaucoup de chefs d’entreprises, ses modalités d’application relevaient du casse-tête depuis son entrée en vigueur le 1er janvier 2015. Ces difficultés mises en lumière par un rapport remis au gouvernement en juin dernier ont conduit à un toilettage destiné à simplifier le dispositif. Après les modifications apportées par la loi sur le dialogue social du 17 août, les deux derniers décrets d’application sont parus au Journal officiel le 31 décembre. Sa mise en place complète est prévue à partir du 1er juillet 2016.
Des facteurs de pénibilité qui ne changent pas
Les dix facteurs de pénibilité n’ont pas été modifiés. Depuis janvier 2015, le travail de nuit, le travail en équipes successives alternantes, le travail répétitif et le travail en milieu hyperbare doivent être pris en compte. Les six autres facteurs (la manutention manuelle de charges, les postures pénibles, les vibrations mécaniques, les agents chimiques dangereux, les températures extrêmes, le bruit) devront l’être à partir de juillet 2016 et non dès janvier, comme prévu à l’origine.
Des précisions sur le bruit et le travail répétitif
L’un des deux décrets parus le 31 décembre 2015 définit les notions de « bruit » et de « pénibilité ».
– Pour le bruit, le salarié doit être exposé à un niveau « rapporté à une période de référence de 8 heures d’au moins 81 décibels pendant au moins 600 heures par an » et à un « niveau de pression acoustique de crête au moins égal à 135 décibels 120 fois par an ».
– Le travail répétitif, lui, est caractérisé par « la réalisation de travaux impliquant l’exécution de mouvements répétés, sollicitant tout ou partie du membre supérieur, à une fréquence élevée et sous cadence contrainte » (15 actions techniques en moins de 30 secondes et 30 actions techniques par minutes sur au moins 900 heures par an).
Pas d’évaluation individuelle de l’exposition à la pénibilité
L’évaluation de l’exposition à la pénibilité de chaque poste de travail, c’était l’une des mesures les plus controversées du dispositif. Aujourd’hui, il n’est définitivement plus question de mesurer l’exposition à la pénibilité de chacun de ses salariés. « Elle va être réalisée par type de fonction », explique Guillaume Bossy, avocat spécialisé en Droit du Travail, associé au sein du cabinet CMS Bureau Francis Lefebvre à Lyon (Rhône). Un diagnostic qui ne relève plus des entreprises elles-mêmes. « L’identification des postes et situations de travail exposés à la pénibilité a été confiée aux branches professionnelles. Ce diagnostic pourra faire l’objet d’un accord négocié entre les organisations patronales et les syndicats ou d’un référentiel professionnel de branche qui devra être homologué par le ministère du Travail », détaille Guillaume Bossy.
Exit la fiche individuelle d’exposition à la pénibilité
A partir de ces référentiels, l’employeur devra finalement effectuer une simple déclaration via la DADS (déclaration automatisée des données sociales) ou la DSN (déclaration sociale nominative) une fois par an. « La caisse de retraite se chargera de calculer les points accumulés par les salariés concernés. Elle les informera des points qu’ils ont acquis et de l’utilisation qu’ils pourront en faire », précise Guillaume Bossy. D’autres modifications, à la marge, ont également été intégrées dans le nouveau texte, comme la réduction du délai de contestation par les salariés. Ceux-ci n’auront plus trois mais deux ans pour remettre en cause la manière dont leur employeur a apprécié leur exposition à la pénibilité.
A noter que la déclaration annuelle n’exonère pas l’employeur de son obligation de sécurité des salariés exposés.