Après des niveaux records en 2022 – 5,2 % – l’inflation est appelée à se maintenir en 2023 à un seuil élevé, confrontant salariés et décideurs à des problématiques oubliées depuis les années 1980. Pouvoir d’achat, rémunération réelle, quels indicateurs retenir pour mesurer son impact ?
Après une décennie de relative stabilité monétaire l’inflation, c’est-à-dire la hausse générale et durable des prix des biens et services, signe son grand retour. Dans son sillage, un problème : « plus l’inflation s’accélère, plus le salaire minimum réel perd de sa valeur », notent les auteurs d’un rapport de l’organisation internationale du Travail (OIT). En clair, avec la même somme d’argent, on peut acheter moins de choses qu’auparavant. Et si les salaires n’augmentent pas dans des proportions équivalentes, la perte en pouvoir d’achat est inévitable. Mais pour prendre la mesure de l’inflation, impossible de se fier à un indicateur seul, il est nécessaire de croiser une série d’informations renseignant l’évolution des prix et les revenus des salariés.
Un problème à géométrie variable
Il existe plusieurs méthodes pour documenter l’inflation, qui varient en fonction du champ d’application et qui permettent de prendre différents angles de vue. L’indice des prix à la consommation (IPC) est, par convention, l’indicateur retenu pour documenter la hausse des prix payés par les consommateurs. Cependant, cette moyenne calculée sur l’ensemble des produits et des services vendus ne touche pas tous les produits consommation ni les consommateurs de façon homogène et il n’est pas un « indice du cout de la vie », précise l’INSEE, qui le mesure à partir l’évolution du coût moyen d’un panier de biens et services achetés par les ménages. Conscient des limites de la mesure de l’inflation au niveau national, l’institut a mis en ligne un simulateur permettant à chacun de calculer son taux d’inflation personnalisé, en fonction de sa structure de consommation, à retrouver ici.
Par ailleurs, l’augmentation du coût de la vie étant particulièrement problématique quand elle touche les produits de première nécessité, certains instituts développent des modèles statistiques spécialement dédiés à ce type de mesures. Et les écarts peuvent être importants avec l’IPC. Tandis que cette dernière atteignait 5,6% ’entre mars 2022 et 2023, l’inflation alimentaire et les produits « petit bazar », elle, grimpait jusqu’à 16,2% sur la même période, d’après l’IRI.
Des indicateurs ciblant des thèmes plus précis que l’IPC (comme les loyers, les produits alimentaires, etc.) sont publiés sur le site de l’INSEE permettant de décomposer l’augmentation des coûts, de mieux comprendre ses composantes et ainsi d’allouer les compensations financières le plus finement possible, c’est à dire aux postes de dépense où elles sont le plus susceptibles d’avoir un impact positifs sur le niveau de vie du salarié…
Pouvoir d’achat, quels indicateurs suivre ?
Avec une baisse de -2,2 % des salaires réels au premier semestre 2022 dans les économies de l’OCDE, selon l’Organisation internationale du travail (OIT), la capacité à combler l’érosion du pouvoir d’achat s’annonce comme un enjeu clé pour les entreprises en 2023 lesquelles, selon une enquête du cabinet Alixio, prévoient d’augmenter leur enveloppe de rémunération de 4,5 % en moyenne.
Mais, à l’échelle individuelle, il est difficile d’appréhender l’évolution des conditions de vie de ses salariés sans disposer d’un référentiel précis et individualisé sur les revenus. L’URSSAF en distingue deux : le salaire mensuel de base (SMB) et le salaire moyen par tête (SMPT) qui présentent chacun des avantages et des limites à connaitre :
- Le SMB est le salaire minimum qu’une entreprise doit verser ; il ne comprend pas les primes, les heures supplémentaires, les avantages en nature ou les indemnités diverses ;
- A l’inverse, le SMPT intègre toutes ces mesures mais ne rend pas compte les inégalités de salaire au sein d’un groupe ou d’une entreprise, ni les variations de rémunération en fonction du niveau de qualification ou d’expérience. Par ailleurs, tout en étant globalement inférieure à l’inflation, la progression des salaires (SMPT) diffère entre les groupes sociaux. Tandis que la prime Macron – devenue entre-temps la prime de partage de valeur (PPV) – a triplé, passant de 2 000 à 6 000 euros (en cas d’accord d’intéressement), l’URSSAF observe des disparités, selon l’âge et les secteurs professionnels. Ainsi, les activités financières et d’assurance, ont versé des primes comprises en moyenne comprises entre 1 054 et 1 242 euros, au-dessus des 789 euros versés en moyenne en 2022.
Il convient donc d’utiliser en complément de ces indicateurs d’autres outils pour obtenir une vision plus complète de la situation salariale d’une population donnée. La Direction de l’Animation de la recherche, des Études et des Statistiques (DARES) met à disposition du public des données permettant de mesurer l’évolution des salaires par catégorie socio-professionnelle (ouvrier, cadre etc…) ou par branche qui offre des points de comparaison utiles.
Besoin d’une mise en pratique ?
Prenons l’exemple de M.Dubois qui touche un salaire mensuel de base de 3000 euros par mois. Il s’agit ici du salaire nominal, celui inscrit sur la fiche de paie. Supposons qu’entre janvier 2022 et janvier 2023, M.Dubois ait été augmenté de 2% (3060 eur) malgré une inflation à 5 %. En conséquence, son salaire réel qui détermine la quantité de biens et services qu’il peut réellement s’acheter par rapport au début 2022 est de 2914 euros en janvier (en euros constant aux prix de janvier 2022). Son pouvoir d’achat a donc diminué de 146 euros.
Pour déterminer le pourcentage d’évolution du salaire de monsieur Dubois, il suffit d’effectuer le calcul suivant :
- nouveau salaire/ 1+ (taux d’inflation/100)