Prévue par la loi du 14 juin 2013, la généralisation de la complémentaire santé obligatoire en entreprise ou mutuelle d’entreprise est entrée en vigueur le 1er janvier de cette année. « Elle s’impose à toutes les entreprises quelle que soit leur taille et leur secteur », précise Sébastien Millet, avocat spécialiste en droit du travail et droit de la protection sociale au cabinet Ellipse avocats.
Pour être en conformité avec la loi, toutes doivent proposer à l’ensemble de leurs salariés une couverture santé complémentaire, respectant un « panier » minimal, fixé par la loi, et financer au minimum ce socle de garanties obligatoires à hauteur de 50 %. « Les entreprises doivent aussi tenir compte de leurs obligations conventionnelles, les branches pouvant fixer des exigences supérieures à celles de la loi », rappelle Sébastien Millet.
Les retardataires qui n’auraient pas prévu ou mis en conformité leur mutuelle d’entreprise, sont donc dans l’illégalité et s’exposent à des risques à la fois juridiques et économiques, celui notamment de se créer un passif social.
L’absence de mutuelle d’entreprise : un risque prud’homal
« Il y a un risque en matière de droit du travail, qui va se dénouer aux prud’hommes. Ainsi, si un salarié d’une entreprise n’ayant pas mis en place de couverture est hospitalisé, il est fondé à demander à l’employeur la prise en charge de ses frais. Et celui-ci devra alors les financer sur sa propre trésorerie », explique le spécialiste. Mais d’autres cas de figure pourraient aussi se présenter, qui seront tranchés par la justice prud’homale. « Un salarié ayant des problèmes de santé importants pourrait estimer qu’il peut utiliser le non-respect par l’employeur de son obligation comme motif de rupture de son contrat de travail », illustre Sébastien Millet. Les organisations syndicales ou les comités d’entreprise pourraient également se saisir du sujet pour demander par exemple l’engagement de négociations.
Mutuelle d’entreprise: de possibles redressements par l’Urssaf
Les entreprises qui disposent déjà d’un contrat de mutuelle s’exposent en outre à un redressement de l’Urssaf. En effet, la participation de l’employeur à la cotisation bénéficie, sous certaines conditions, d’une exonération de charges sociales.
Le régime doit pour cela être considéré comme véritablement collectif, obligatoire et responsable. Autant de points avec lesquels se mettre en conformité. Les contrôleurs de l’Urssaf s’assureront ainsi que la complémentaire santé couvre bien l’ensemble des salariés, même s’il est possible de prévoir des régimes différents pour les cadres et non-cadres. Ils vérifieront également son caractère obligatoire. « L’employeur est libre de prévoir certains cas de dispense d’affiliation pour les salariés, mais il doit pouvoir produire les justificatifs de ceux qui auront choisi de ne pas cotiser », précise Sébastien Millet. Pour être qualifiés de « responsables », les contrats devront enfin respecter des règles définies par la loi, qui impose notamment un plafonnement des remboursements pour l’optique ou les dépassements d’honoraires. L’Urssaf examinera aussi le respect du formalisme prévu dans la mise en place du régime.
Si un contrôle révèle un manquement, la part de la contribution de l’employeur au régime pourra être requalifiée en complément de salaire. L’entreprise fera alors l’objet d’un redressement, portant sur les cotisations sociales dont elle a indûment été exonérée, et dont le montant, sera, d’après la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2016 du 21 décembre 2015, modulé en fonction de la gravité de son motif.