La protection des innovations est un enjeu crucial pour les entreprises françaises. La loi Pacte et la loi sur le secret des affaires prévoient de nouveaux dispositifs pour l’améliorer.
L’innovation est un facteur de compétitivité et de croissance pour les entreprises dans une économie mondialisée et fortement concurrentielle. Aussi, la loi Pacte, promulguée le 22 mai 2019, a apporté des nouveautés en matière de protection de la propriété industrielle. L’objectif : mieux protéger les innovations réalisées par les PME, qui représentent de nombreux demandeurs de brevet en France.
Protection des innovations : le certificat d’utilité plus attractif
Moins connu que le brevet, le certificat d’utilité pourrait connaître un nouvel essor. Avec la réforme initiée par la loi Pacte, ce titre de propriété industrielle a vu sa durée de validité être allongée, passant de six à dix ans. Si celle du brevet reste plus longue – vingt ans – le certificat d’utilité a l’avantage d’être peu contraignant à mettre en place et d’être délivré rapidement. Un atout de taille pour les technologies évoluant rapidement. Il est de surcroît moins coûteux.
« Pour les TPE et PME, le certificat d’utilité représente une bonne alternative par rapport à la demande de brevet », confirme maître Eric Caprioli, avocat à la Cour de Paris, spécialiste en droit de la propriété intellectuelle et membre du réseau d’avocats Juris Défi. La loi Pacte a dans le même temps rendu possible sa transformation en brevet, et inversement.
Cela offre davantage de possibilités à l’entreprise, qui va pouvoir choisir le titre le plus avantageux en fonction de sa stratégie commerciale
Autre nouveauté, une entreprise innovante peut désormais effectuer une demande provisoire d’attribution de brevet. Elle permet de prendre date en termes d’antériorité et de différer la remise de certaines revendications. En clair, pour l’entreprise, il devient possible de rendre publique une innovation sans attendre le dépôt du brevet définitif. « Les entreprises vont ainsi pouvoir affiner leur stratégie en bénéficiant du brevet », note l’avocat du cabinet Caprioli et Associés.
Des modalités de recours renforcées
La loi Pacte a aussi accru les possibilités de recours en créant une procédure d’opposition pour les brevets. Il est désormais possible de déposer un recours administratif directement devant l’Institut national de la propriété industrielle (INPI), dans un délai de neuf mois à compter de la délivrance d’un brevet pour demander sa révocation partielle ou totale. De plus, elle prévoit que les actions en nullité ne sont dorénavant soumises à aucun délai de prescription, alors que le délai de prescription était auparavant fixé à cinq ans.
La procédure d’examen des brevets devant l’INPI se renforce également afin d’améliorer la crédibilité du système des brevets. Au critère de la nouveauté, s’ajoute désormais l’examen de l’inventivité. « Cette définition, plus subtile et subjective, permet d’évacuer les brevets qui ne sont pas réellement innovants », appuie l’avocat.
Protection des innovations : le secret des affaires
Depuis le 30 juillet 2018, le droit français a donné aux entreprises un nouvel outil de protection : la loi sur la protection du secret des affaires. Une loi qui vise à compléter l’arsenal juridique existant, notamment le secret de fabrique. « L’inconvénient est qu’il n’était opposable qu’au salarié et au directeur. Il y avait des trous dans la raquette », constate Me Caprioli.
Cette loi, qui transpose en droit français de la Directive européenne du 14 avril 2016, permet aux entreprises de se protéger contre une appropriation illicite de leur savoir-faire ou de leurs informations commerciales et technologiques. « Elle ne protège pas les innovations en tant que telles, mais des informations confidentielles qui ne seraient pas protégées par le brevet ou un autre droit de propriété intellectuelle. D’une certaine manière, cela empêche d’aller piller le département R&D d’une société », souligne l’avocat.
Selon l’expert, la loi va de pair avec la mise en place « d’une politique de confidentialité et d’un tatouage de la création (watermarking) des documents, avec généralement trois niveaux : libre, interne, strictement confidentiel. C’est ce marquage qui va conférer la protection par l’identification de ce que l’entreprise considère comme secret. »