Impossible de créer son entreprise sans ouvrir un compte bancaire séparé. Mais faut-il pour autant passer par un compte bancaire « professionnel », plus coûteux qu’un compte classique?
C’est un prérequis obligatoire, y compris pour les auto-entrepreneurs. Lorsqu’on créé son entreprise, il faut impérativement ouvrir un compte bancaire « professionnel » – autrement dit, séparé de tout compte bancaire personnel, pour que les opérations effectuées par l’entreprise restent bien claires au niveau comptable. Or, tout créateur d’entreprise le sait bien : les comptes bancaires « professionnels » tels qu’ils sont proposés par les banques pratiquent des frais bien plus élevés que ceux des comptes particuliers, y compris pour de simples opérations financières limitées aux virements et débits. Des frais qui peuvent paraître dissuasifs, notamment pour les entrepreneurs individuels et plus généralement ceux qui n’ont pas besoin de services bancaires spécifiques. En principe, ces derniers pourraient donc être fondés à ouvrir un simple compte classique, du moment qu’il reste distinct de toute autre activité. Mais en réalité cette pratique s’avère assez délicate et même financièrement risquée.
Le compte bancaire professionnel : obligatoire à l’ouverture de la société
Pour les sociétés, EURL, SA, SAS ou SARL, l’ouverture d’un compte professionnel est impérative au moment de la création : il est impossible de faire immatriculer son entreprise, sans passer par cette étape. « Les fonds qui composent le capital social doivent être déposés sur un compte et justifiés par une attestation bancaire », explique Stéphane Lambert, expert-comptable au sein du cabinet Michel Creuzot, membre du groupement France Défi. En théorie, rien n’empêche le chef d’entreprise de clôturer ensuite ce compte professionnel pour transférer les fonds et les opérations liées à la société sur un compte courant classique. « Mais on voit difficilement une banque accepter d’ouvrir un compte non professionnel au nom d’une société. Et il est fortement déconseillé de céder à la tentation, pour le dirigeant, d’ouvrir un compte en son nom pour limiter les frais car cela pourrait sembler suspect à l’administration fiscale », prévient l’expert-comptable. Le risque, non négligeable, serait en effet de voir les sommes versées sur ce compte requalifiées en salaires en cas de contrôle ou considérées comme des distributions occultes.
De leur côté, les artisans commerçants sont tenus eux aussi de se faire ouvrir un compte dans un établissement de crédit ou dans un bureau de chèques postaux, d’après le Code du commerce. Mais ce dernier ne précise pas la nature du compte à ouvrir. « Néanmoins, s’ils souhaitent disposer d’un terminal de paiement par carte bleue, ont besoin d’emprunts ou d’autorisations de découvert, ils ont tout intérêt à ouvrir un compte professionnel », souligne Stéphane Lambert.
Dédier un compte à l’activité professionnelle
La situation est un peu différente pour les auto-entrepreneurs. Depuis le 1er janvier 2015, ils sont eux aussi soumis à l’obligation d’ouvrir un compte dédié à leur activité professionnelle. Il s’agissait, pour le législateur, de lutter contre la fraude aux cotisations sociales. Mais là encore, la loi ne parle pas spécifiquement d’un compte professionnel. Il est donc en théorie possible de consacrer un compte courant classique à son activité. Sauf que les banques refusent a priori l’existence de tels comptes et sont susceptibles de les clôturer si elles détectent des mouvements professionnels, comme des prélèvements Urssaf. Mieux vaut donc ne pas s’y risquer.
En revanche, rien n’empêche le futur dirigeant de tenter de discuter les conditions d’ouverture de son compte professionnel. « Les frais pratiqués sont en général de l’ordre de 20 à 30 € par mois. Certains de mes clients n’en paient toutefois aucun ! Bien sûr il est plus facile de le faire quand l’entreprise va bien et représente un client significatif pour la banque mais il ne faut pas hésiter à négocier sur ce point », conseille Stéphane Lambert.