Affectées par la pandémie, de nombreuses entreprises tentent d’obtenir une indemnité pour les pertes d’exploitation qu’elles subissent. Une minorité d’assureurs garantissent, pour l’heure, les conséquences financières de cette crise. Explications.
Depuis le 14 mars, date à laquelle les commerces « non essentiels à la nation » ont été contraints de fermer, l’inquiétude ne cesse de monter pour ces chefs d’entreprise. En effet, si les mesures mises en place par le gouvernement facilitent le report de certaines charges (Urssaf, loyers…), de nombreuses entreprises sont confrontées à une perte de leurs revenus qui sont parfois nuls, et par conséquent de leur chiffre d’affaires.
Tandis que certaines entreprises ont souscrit une garantie perte d’exploitation, une majorité d’assureurs refuse le versement d’une indemnité lorsque ces pertes ne sont pas consécutives à un dommage matériel.
Couverture des pertes d’exploitation : la CPME et l’UMIH montent au créneau
Rappelons-le, la garantie perte d’exploitation est un contrat d’assurance non obligatoire. Elle permet de faire face à l’arrêt accidentel de son activité et d’indemniser les pertes subies en raison de la diminution de son chiffre d’affaires. Cette garantie est rattachée à un contrat principal, destiné à couvrir les dommages matériels (bris de machine, inondation, vol, incendie…) causés par les événements garantis par ce contrat.
Or, la spécifié de la crise sanitaire actuelle tient justement au fait qu’elle peut causer une perte d’exploitation sans forcément causer de dommages matériels aux commerces. Pour cette raison, de nombreuses sociétés d’assurance refusent de garantir les conséquences financières de la pandémie.
Face à ce constat, la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) et l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie (UMIH) ont réclamé « la reconnaissance par les pouvoirs publics d’un état de catastrophe sanitaire afin de pouvoir débloquer une indemnisation des compagnies d’assurance pour les effets non assurables, comme le prévoit le Code des assurances pour les catastrophes naturelles ». Reste que, pour l’heure, cette prise en charge n’est pas prévue dans le cadre des catastrophes sanitaires.
Que faire si vous bénéficiez d’une garantie perte d’exploitation ?
Pour les entreprises assurées, il reste néanmoins possible et recommandé de déclarer votre sinistre rapidement, par écrit (courrier ou mail), auprès de votre compagnie d’assurance.
Si la garantie perte d’exploitation est refusée, vous aurez la possibilité de faire appel à un avocat pour analyser votre contrat, et déterminer si ce refus est justifié.
Dans le secteur de la restauration, notamment, des contrats peuvent couvrir le risque épidémique et la fermeture administrative en raison d’un risque sanitaire ou hygiénique. Ainsi, les dispositions des contrats d’assurance méritent d’être examinées au cas par cas, si vous vous posez la question de savoir s’il est possible de faire jouer la garantie perte d’exploitation.
L’État fait pression sur les assureurs
Face à l’absence de la prise en charge assurantielle des conséquences économiques de l’épidémie de Covid-19, l’État tente d’exercer une pression sur les assureurs. À plusieurs reprises, Bruno Le Maire a appelé le secteur à participer à l’effort de solidarité nationale, et à s’impliquer en prenant en charge la perte d’exploitation sans dommages, en particulier dans le secteur de la restauration et de l’hôtellerie. Le ministre de l’Économie et des Finances a d’ailleurs indiqué que « l’État ne prendra pas en charge la perte d’exploitation sans dommages ». « Les assurances doivent être au rendez-vous de cette mobilisation économique. J’y serai attentif » a pour sa part appuyé le président de la République Emmanuel Macron, lors de son allocution télévisée du 13 avril.
Pour apaiser les tensions, la Fédération française de l’assurance (FFA) a déclaré que le secteur allait verser 400 millions d’euros au fonds de solidarité mis en place par le gouvernement. Ce fonds est destiné à soutenir les TPE, les indépendants, les microentreprises, les associations, les professions libérales, les agriculteurs membres d’un groupement agricole d’exploitation en commun, les artistes-auteurs et les entreprises en redressement judiciaire ou en procédure de sauvegarde.
Un groupe de travail pour une meilleure couverture des pertes d’exploitation ?
Le 19 mars, la FFA a par ailleurs annoncé des engagements auprès des TPE et des indépendants, à savoir « conserver en garantie les contrats des entreprises en difficulté en cas de retard de paiement suite à la pandémie, et ce pour toute la durée de la période de confinement ». Plus récemment, la fédération a rappelé que des mesures destinées à des métiers spécifiques (bâtiment, commerces non alimentaires, réparations automobile…) ont été également prises, « soit collectivement par l’ensemble de la profession, soit par les assureurs les plus concernés ».
Un groupe de travail, qui réunit les assureurs et le ministère des Finances, a été lancé. Il doit trouver une solution de long terme qui permette une couverture collective des pertes d’exploitations des entreprises en cas de catastrophe sanitaire. Parmi les éléments à trancher figureront, notamment, le degré d’indemnisation pour les entreprises et les types de risques qui permettront de déclencher un état de catastrophe sanitaire. Les propositions issues de ses travaux devraient être présentées d’ici à la fin du mois de juin.