Entre les dégâts matériels et l’arrêt contraint de l’activité, de nombreuses entreprises doivent aujourd’hui faire face aux conséquences des inondations de ces derniers jours. Si celles-ci peuvent s’avérer très lourdes, des moyens existent pour réussir à les surmonter.
La déclaration du sinistre suite aux inondations : une urgence
« La première chose à faire est de déclarer son sinistre auprès de son assurance », souligne Stéphane Lambert, vice-président de France Défi et associé du cabinet Michel Creuzot. L’expert-comptable, dont une attestation peut être demandée par les assurances, est alors un interlocuteur de choix pour calculer son préjudice. « On pense souvent à la perte d’une machine, mais pas forcément à la perte de chiffre d’affaires, l’expert-comptable peut déterminer la perte d’exploitation, de marges, et justifier les calculs », précise le spécialiste. Suite aux inondations, l’état de catastrophe naturelle que le gouvernement doit reconnaître jeudi 8 juin, en conseil des ministres, devrait faciliter les indemnisations en raccourcissant notamment leurs délais de versement à trois mois. Quoi qu’il en soit, il importe de conserver toutes les preuves de son sinistre, comme les factures, les devis mais aussi les photos prises avant le nettoyage.
Les différentes options pour gérer son personnel
En interne, les entreprises des zones concernées par les inondations doivent aussi trouver une solution pour gérer leur personnel. Dans le cas où des salariés ne sont pas en mesure de se rendre sur leur lieu de travail, l’employeur ne peut en être tenu responsable. Il n’a donc pas l’obligation de les rémunérer en leur absence. « Pour éviter que la situation n’impacte le salaire net des salariés, il peut néanmoins, s’il le souhaite, leur proposer de prendre des congés payés ou des RTT », explique Stéphane Lambert.
En revanche, l’employeur est tenu de fournir du travail à ses salariés. Dans le cas où l’entreprise, du fait des inondations, n’est pas en mesure de reprendre son activité, elle doit donc maintenir leur rémunération même s’ils ne travaillent pas. « Certains contrats d’assurance couvrent aussi ce risque », précise l’expert-comptable. Si ce n’est pas le cas, l’employeur peut éventuellement proposer là aussi à ses salariés de prendre des jours de congés, mais ceux-ci ne sont pas obligés d’accepter. Une autre solution consiste alors à recourir à de l’activité partielle, un dispositif de l’Etat qui aide l’entreprise à faire face à des événements exceptionnels les contraignant à réduire la durée de travail de leurs salariés.
Une indemnisation pour compenser l’arrêt d’activité
Il faut, pour en bénéficier, effectuer une demande préalable et motivée auprès de la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte). Une démarche pour laquelle l’entreprise peut être accompagnée par son cabinet d’expertise-comptable. « La réponse de la Direccte est généralement très rapide. Cela lui permet ensuite de recevoir une allocation de 7,74 € par heure de travail chômée, en contrepartie de laquelle elle garantit à ses salariés une indemnisation d’activité partielle égale à 70 % de leur salaire brut pendant les heures non travaillées », détaille Stéphane Lambert. Si les salariés ont l’obligation d’accepter ce dispositif, ils doivent néanmoins être tous concernés par l’activité partielle, ou au moins tous ceux relevant d’une même catégorie de personnel. L’entreprise obtient le versement des allocations correspondant aux heures chômées, dans la limite de 1000 heures par an et par salarié, en remplissant chaque mois une demande d’indemnisation en ligne.
La souplesse des services publics pour les déclarations de TVA
Difficile de remplir ses déclarations de TVA ou de veiller au paiement de ses cotisations, lorsque son entreprise a les pieds dans l’eau. Mais face à ce contexte particulier, les services de l’Etat peuvent se montrer compréhensifs. « Il est toujours possible de négocier sur les échéances, mais en cas de catastrophe naturelle, ces services devancent généralement la demande », assure Stéphane Lambert. Ainsi, le Régime social des indépendants (RSI) a d’ores-et-déjà mis en place un dispositif d’urgence dédié aux chefs d’entreprises sinistrés. Il repose notamment sur l’activation du fonds catastrophe intempéries permettant l’octroi d’une aide forfaitaire aux chefs d’entreprises confrontés à une situation d’urgence extrême mais aussi sur la possibilité pour eux d’obtenir un étalement du règlement de leurs cotisations voire leur prise en charge. Ils peuvent également prendre contact avec les chambres de commerce et d’industrie, certaines ayant, à l’image de la CCI de l’Essonne ou du Loiret, mis en place une cellule spéciale et des fiches techniques disponibles en ligne. On peut ainsi télécharger une lettre type pour solliciter la bienveillance des services publics.
Vis-à-vis de ses clients : obligations et cas de force majeure
Le Code civil prévoit « qu’il n’y a lieu à aucuns dommages et intérêts lorsque, par suite d’une force majeure ou d’un cas fortuit, le débiteur a été empêché de donner ou de faire ce à quoi il était obligé, ou a fait ce qui lui était interdit ». Or, la survenue d’une inondation, du fait de son caractère imprévisible et irrésistible, est généralement considérée comme un cas de force majeure. « Cela signifie que le préjudice subi par le client d’une entreprise auprès duquel elle ne peut pas honorer son contrat ne pourra pas lui être imputé », explique Caroline Vazelle, associée et responsable du service juridique au cabinet Michel Creuzot. Le prestataire est exonéré de son obligation pendant le temps requis pour effacer les effets de l’événement. Néanmoins, certains contrats peuvent comporter des clauses aménageant la définition de la force majeure. Il importe donc de les vérifier pour connaître ses obligations et dans tous les cas, de prévenir ses partenaires de ses difficultés. Là encore, le cabinet d’expertise-comptable peut apporter son aide, dans le cas où un accompagnement juridique est nécessaire.
Rebondir après les inondations
En même temps que l’on effectue les démarches pour gérer les conséquences directes du sinistre, il peut aussi être judicieux de se projeter sur les problématiques à venir. « On peut alors apporter notre soutien pour rassurer le chef d’entreprise sur le pilotage des prochains mois, en faisant par exemple un prévisionnel, en étudiant les impacts des inondations sur la rentabilité de l’entreprise ou en mettant au point un plan de financement avec les partenaires bancaires », détaille Stéphane Lambert. Un bon moyen de clarifier les perspectives.