Une entreprise qui en acquiert une autre, c’est classique. Sauf lorsqu’il s’agit d’une Scop achetant une société par actions simplifiées (SAS), qui devient elle aussi une Scop au cours de l’opération.
En mai dernier, l’entreprise spécialisée dans la fabrication de ressorts Séfard, employant 50 salariés, est devenue une société coopérative et participative (Scop). Rien de très original puisque l’on compte plus de 2 800 entreprises de ce type en France, dont 319 ont vu le jour durant la seule année 2015. Ce qui l’est davantage, c’est le contexte dans lequel s’est déroulé ce changement : cette société industrielle a en effet été rachetée par une Scop, TPC, réalisant du conditionnement à façon pour l’industrie cosmétique, afin de constituer un groupement de Scop. Une première depuis que cette possibilité a été autorisée par la loi Economie sociale et solidaire (ESS) adoptée en juillet 2014, dans le but d’améliorer la compétitivité de ces structures et de favoriser leur développement. « Nous sommes une entreprise adaptée dont 80 % des 210 salariés sont des personnes handicapées. Le désengagement de l’État dans le soutien aux entreprises adaptées nous a conduit à envisager de diversifier nos activités en réalisant l’acquisition d’une autre entreprise, dans un secteur différent du nôtre », explique Stéphane Foisy, PDG de TPC depuis 2013 et désormais président du groupement Calice, réunissant les deux entités.
Des réunions pour convaincre les salariés d’opter pour la Scop
Première étape pour TPC, après validation du projet par son assemblée générale, la recherche de la bonne « cible ». « Aidé par le cabinet conseil Euralia Finance, nous avons arrêté notre choix sur Séfard, une entreprise de 50 salariés qui avait une particularité intéressante : son patron, Thierry Cousin, avait déjà envisagé de transformer sa société en Scop. Ce qui a facilité les échanges », souligne Stéphane Foisy. Restait encore à convaincre le personnel du bien-fondé de l’opération. « Il fallait que 50 % du personnel soit partant pour investir dans l’opération. Avec des représentants de l’Union régionale des Scop Centre Val de Loire, nous avons organisé plusieurs réunions d’information, et même des rendez-vous individuels pour ceux qui le souhaitaient », indique encore Stéphane Foisy. Un souci de pédagogie souvent de mise dans l’univers des Scop. « L’humain y tient un rôle de premier plan. Nous n’avons pas en face de nous des responsables financiers mais des chefs d’équipe, des secrétaires ou des opérateurs. Le discours doit être clair et compréhensif pour tous, l’information donnée en toute transparence », note Laetitia Chatron, expert-comptable au sein du cabinet Bidault-Richard et associés, membre du groupement France Défi, qui a accompagné cette opération. Verdict : 34 salariés, soit 74 % de l’ensemble du personnel, ont accepté d’investir 1 500 € chacun pour assurer la pérennité de leur entreprise et être partie prenante de son avenir.
55 % des bénéfices reversés aux salariés
De son côté, TPC a acquis Séfard et ses locaux pour 2 millions d’euros. « Le capital a ensuite été redéfini à 500 000 €. Il est détenu à 25 % par le personnel. Avec l’objectif que ce pourcentage atteigne 50 % d’ici 10 ans », précise Stéphane Foisy. Ces nouveaux actionnaires devront donc remettre au pot, en réinvestissant une partie du montant de leur participation et de leurs dividendes : comme chez TPC, 55 % des bénéfices de Sefard seront redistribués aux salariés (45 % en participation et 10 % en dividendes). Désormais, les salariés de la nouvelle Scop, membre du groupement Calice, vont devoir se familiariser avec les indicateurs clés, comme le seuil de rentabilité, et se plonger dans la lecture des bilans et des comptes de résultats. Pour les y aider, des formations sont d’ores et déjà programmées.