Avec la généralisation du télétravail, la frontière entre vie personnelle et vie privée tend à se brouiller. Dès lors, la question du droit à la déconnexion se pose à nouveau.
Avec le développement des nouvelles technologies, le digital s’est peu à peu immiscé dans la vie des salariés. Pour tenter d’en contenir les excès, la loi dite Travail du 8 août 2016 a introduit le « droit à la déconnexion ». Selon le Code du travail, toutes les entreprises sont désormais tenues « d’assurer le respect des temps de repos et de congé ainsi que de la vie personnelle et familiale » des salariés. « Ce droit permet de rappeler qu’il existe des limites qui s’ajoutent au cadre légal des temps de travail », explique Sylvain Lagrange, juriste en droit social et responsable des ressources humaines au sein du groupe CAEC, membre du groupement France Défi.
Droit à la déconnexion : des pratiques plutôt que des règles
En théorie, le droit à la déconnexion doit être le fruit d’un accord entre la direction de l’entreprise et les représentants du personnel. Mais « en pratique, il y a encore peu d’accords collectifs », constate Sylvain Lagrange.
À défaut d’accord, une charte interne peut être mise en place pour définir les modalités de l’exercice du droit à la déconnexion. « Il n’y a pas de règles particulières, mais plutôt des pratiques à respecter », précise l’expert. L’employeur a notamment une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des salariés. « Il lui revient d’accompagner la mise en place du droit à la déconnexion. Cela conduit à un changement de comportement de sa part, en évitant par exemple de solliciter ses collaborateurs à des heures indues. »
Si l’employeur doit montrer la voie à suivre, le salarié qui serait tenté d’en faire toujours plus doit aussi se poser ses propres limites. Pour faire respecter le droit à la déconnexion, certaines entreprises n’hésitent pas à couper leurs serveurs, passée une certaine heure. « Le seul moyen vraiment efficace », selon Sylvain Lagrange. Ce dernier note aussi que pour pouvoir se déconnecter, « il faut pouvoir ne pas être sollicité» : « Il est fréquent que des appels téléphoniques soient reçus en dehors des horaires de travail. Ceux qui n’ont pas d’horaires perçoivent moins ceux des autres. Au sein du groupe, les téléphones des responsables de service sont tous équipés en double SIM afin de pouvoir assurer ce droit à la déconnexion. C’est une pratique qui tend de plus en plus à se généraliser au sein des entreprises. »
Droit à la déconnexion et télétravail : respecter les horaires
Depuis la généralisation du télétravail, la question du droit à la déconnexion est revenue sur le devant de la scène.
Le télétravail supprime le sas de décompression que représente le trajet entre le lieu de travail et le domicile. La vie professionnelle s’insère plus facilement dans la sphère privée. Il y a un réel risque qui peut aller jusqu’au burn-out
Au lendemain du déconfinement, le groupe CAEC a actualisé son document unique d’évaluation des risques. « Parmi notre soixantaine de collaborateurs, ceux qui ont le mieux vécu le confinement sont ceux qui respectaient leurs horaires habituels de travail, note le responsable RH. Cela reste la meilleure façon de vivre le télétravail et de déconnecter. »