Avec ses clients, comme avec ses partenaires, le quotidien d’une entreprise est rythmé par la conclusion et l’exécution de contrats. Or depuis le 1er octobre, la réforme du droit des contrats issue de l’ordonnance du 10 février 2016 est entrée en vigueur et a changé les règles.
Une réforme du droit des contrats pour confirmer des usages…
Visant à moderniser et clarifier un droit vieux de plus de deux siècles, la réforme devrait sur de nombreux points faciliter la vie des entreprises en consacrant des principes issus de la jurisprudence. Volontarisme et liberté contractuelle en demeurent les piliers.
… et apporter des nouveautés
« Même si le projet n’était pas d’innover mais de réformer à droit constant, il existe comme toujours une part de nouveauté qui crée du flou et de l’incertitude quant à la manière dont le texte sera appliqué », tempère Gwenaëlle Lavillenie, responsable juridique du cabinet 3G Gadras, membre de France Défi. Certains points méritent donc toute la vigilance des entreprises, au risque sinon de se retrouver devant le juge sans pouvoir anticiper la manière dont le nouveau code sera appliqué.
Une extension de l’obligation de bonne foi
La réforme étend par exemple à la phase de négociation, l’obligation de bonne foi à laquelle sont soumises les parties d’un contrat. En découle un assez large devoir d’information puisque, selon le texte, « celle des parties qui connaît une information dont l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre doit l’en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant ». « Pour verrouiller les choses, je conseille aux entreprises de passer au maximum par l’écrit et par exemple d’ajouter une clause en préambule du contrat indiquant que la société reconnaît avoir été informée de tout élément déterminant pour son consentement », conseille Kérine Tran, juriste au sein du cabinet ARC.
Un régime spécifique pour les contrats d’adhésion
Pour les contrats d’adhésion, ceux dont les conditions générales ne sont pas négociées mais imposées par l’une des parties (contrat d’énergie ou abonnement Internet par exemple), le Code civil précise désormais que « toute clause qui crée un déséquilibre significatif » entre les droits et obligations des parties sera considérée comme non-écrite, donc nulle. En cas de doute sur l’interprétation d’une clause, celle-ci sera faite en faveur de la partie qui n’a pas pu négocier. « Les entreprises qui proposent ce type de contrat doivent donc vérifier leurs conditions générales de vente pour s’assurer de l’équilibre entre les obligations des parties », souligne Kérine Tran.
Des contrats moins intangibles
Autre élément d’incertitude, la possibilité, ouverte par la réforme, de demander la renégociation d’un contrat dans le cas où « un changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat rend l’exécution excessivement onéreuse pour une partie qui n’avait pas accepté d’en assumer le risque ». En cas de désaccord entre les contractants, c’est in fine le juge qui pourra être amené à remodeler en profondeur le contrat. « Ce pouvoir très large laissé au juge, ajouté à la durée moyenne des contentieux (environ 8-10 ans) n’est pas très sécurisant », s’inquiète Gwenaëlle Lavillenie.
Toutefois, ces dispositions n’étant que supplétives, la spécialiste conseille donc aux entreprises d’inclure dans les contrats des clauses permettant d’y déroger. Pour s’adapter à la réforme, un véritable audit de l’ensemble de ses contrats est donc nécessaire.